Ceux qui n'ont rien appris du passé

 

Actuellement, le mouvement révolutionnaires iranien est dans une situation douloureuse et difficile. Beaucoup ont abandonné la lutte révolutionnaire et évitent d'aborder les problèmes qui se posent à tous les courants d'opposition. Nous allons malgré tout les étudier, bien que cela puisse être répétitif pour ceux qui ont passé de longues années à lutter.

Commençons par une brève étude historique, à partir de l'insurrection de février 1979. A cette époque, la majorité des organisations et les différentes couches de la société étaient engagées dans la révolution, pour ou contre. Chaque courant y participait selon son appartenance de classe et ses conceptions politiques. L'Organisation des Guérilleros Fédaïs du Peuple d'Iran (OGFPI) était encore bien unie et n'avait pas encore subi les schismes qui ont divisé ses forces en deux ou en trois. L'insurrection et le grand mouvement de la population avait surpris toutes les formations politiques. En réalité, pour beaucoup de gens, le but de la révolution n'était pas encore évident. Régulièrement nous faisions face à de vives discussion sur son avenir. Tous les groupes politiques en parlaient, mais il n'y avait aucun programme, du moins de la part des organisations qui avaient levé le drapeau de la révolution depuis des années.

Si l'on accepte ces réalités, on comprend les points de vue erronés qui se sont propagés.

Cela fait plus de 18 ans que le régime de la république islamique d'Iran (RII) est au pouvoir. Durant toute cette période les querelles futiles et inutiles entre les différentes organisations d'oppositions ont sans cesse augmenté, au point qu'aujourd'hui malheureusement certains de ces courants ont abandonné la lutte contre le régime de la RI pour lutter contre les organisations politiques de l'opposition. Le régime iranien a profité de cette totale déchirure entre les organisations d'opposition pour se renforcer. Ainsi peut-il se permettre d'écraser dans le sang toute protestation dans le pays et sur la scène internationale entrer en accord avec les grandes puissances. C'est grâce à sa tranquilité d'esprit au plan interne qu'il peut aujourd'hui réfléchir à l'exportation de la révolution islamique dans le monde. Un jour, il crée des tragédies au Liban. Le lendemain, la Bosnie-Herzégovine devient l'arène des gardiens de la révolution islamique. Dans la poursuite de cette politique, ce régime ne connaît aucune limite, si bien qu'il consacre même un budget spécial à l'aide et au soutien des mouvements et des pays proches comme le Soudan, l'Algérie, la Syrie, l'Afghanistan ou d'autres. Depuis des années le régime de la RI joue un rôle de guide auprès de ces pays car il espère récupérer ainsi la direction des pays réactionnaires et se placer dans une position favorable dans ses négociations avec l'impérialisme.

A l'étranger, le régime a essayé de recréer son organisation clandestine et terroriste dans les pays où il y a des réfugiés politiques. Et c'est pour cette raison que de temps à autres un des militants de l'opposition de gauche ou de droite tombe sous les coups des agents du régime.

Nous avons décrit cette situation objective pour attirer l'attention de nos lecteurs sur notre principal ennemi - le régime de la RII - et détailler ensuite le phénomène de la dictature et ses conséquences.

 

Ceux qui profitent des antagonismes existant au sein de l'opposition

Nous reconnaissons que par le passé, suite aux coups du régime de la RI et aussi à cause des différends internes, nous nous sommes affaiblis. Dans un premier temps, nous devons donc examiner nos erreurs du passé pour y mettre un terme. Ensuite, en approfondissant notre connaissance, nous tenterons de développer et d'intensifier notre lutte.

Ces dernières années, une grande partie de l'énergie de notre organisation a été consacrée aux querelles internes. Depuis longtemps, au nom de la « lutte idéologique » nous avons traité des propos et nous avons rédigé des critiques qui n'étaient pas utile. Tous ces écrits sont restés sur le papier. Ce type de pensée au sein de l'Organisation n'est pas parvenu à résoudre l'origine de la crise et a été par contre à l'origine d'autres conflits et de l'aggravation des différends.

Le régime de la RI a profité de cette situation. Par le biais de centaines de ses éléments secrets ou connus au sein de dizaines de cercles et de groupes ou bien infiltrés dans différents courants, il a agi comme un metteur en scène.

Dès le lendemain de l'insurrection, l'affrontement armé de l'Organisation avec le régime a commencé dans différentes régions d'Iran. Il était donc normal et naturel dans cette étape de la lutte qu'attiser les différends au sein de l'Organisation soit une priorité.

Les agressions politico-militaires du régime d'une part et l'esprit borné, avide de pouvoir et irresponsable d'une partie de l'opposition d'autre part ont tourné la situation en faveur du régime. Au point que certains courants ont estimé que leur renforcement était lié à l'affaiblissement de notre organisation ou d'autres organisations actives. Pour réussir dans leur politique, ils sont restés aux côtés du régime de la RI. Certains courants, en apparence marxiste qui auraient dû être en principe à nos côtés. Mais ce sont ceux-là précisement qu'ont chuté dans ces compromissions. C'est pourquoi nos amis d'hier sont devenus nos ennemis d'aujourd'hui.

 

Concernant la prise de position des différentes organisations politiques : l'Organisation des Moujahedines du Peuple d'Iran (OMPI) et les cercles proches du régime de la RII

 

A propos des différentes organisations politiques

Nous n'avons pas l'intention de détailler les positions de chacun de nos opposants. Car, qu'ils soient nationalistes, royalistes, ou réformiste, nous constatons que l'attitude de ces courants politiques à l'égard des problèmes quotidiens se limite à une opposition avec nos pensées et notre politique ou à celles des autres organisations. Cette position dépend de la réflexion de chaque formation et nous n'y sommes pas opposés.

Nous ne nous attendons pas à ce que les autres courants politiques confirment notre ligne de conduite et notre politique. Tant qu'ils n'adoptent pas une ligne de conduite comme celle de l'OMPI, ou qu'ils n'abaissent pas sciemment le crédit et le prestige de leur organisation au niveau des différents cercles et groupes qui abandonnent certes le régime mais qui à l'étranger ne font qu'insulter et injurier les autres organisations, nous apprécierons leur attitude et leur démarche constructive.

Qui sont ces courants ou ces éléments opposés à l'Organisation ?

Quel intérêt de classe entraîne leur chute idéologico-morale ?

Laissons de côté le régime de la RI car il est bien connu et dénoncé auprès de tout le monde. Après le régime, c'est l'OMPI qui fait preuve de la plus grande opposition à l'égard de notre Organisation. Ces oppositions haineuses sont-elles sans fondement ? Certainement non. Nous essayons d'expliquer les origines et les motifs de ces différends :

 

A propos de l'OMPI et des cercles proches au régime de la RII

Nos différends avec ces individus résultent de deux conceptions complètement différentes. Notre organisation proclame toujours haut et fort une nouvelle fois qu'elle défend l'idéologie marxiste-léniniste et veut l'instauration d'une république démocratique populaire en Iran. Dans le cadre des collaborations avec les autres organisations, nous défendons nos principes et nous les exprimons ouvertement. Réciproquement nous sommes pour le respect des autres conceptions politiques et des différentes religions. Cela fait partie de nos valeurs. Celui qui craint la pensée et les croyances d'autrui se croit encore à l'époque du féodalisme et prouve ainsi son réactionnisme.

Jusqu'à présent la secte dirigée par Mariam et Massoud Radjavi est parvenue à quelques «mutations ». Le dernier « saut» dans l'évolution de cette organisation se caractérise par l'incompétence des hommes à occuper les rangs de la direction. A part Massoud Radjavi, évidemment ! La direction de cette secte doit être assurée par les femmes et bien sûr les hommes escortant Radjavi sont obligés de leur obéir et de les accepter. Si non, ils sont emprisonnés et torturés.

La secte de Massoud et de Mariam est pour l'instauration d'une autre RI. Leur RI est accompagnée du terme « démocratique ». Ils voulaient donner la place de Khomeiny et aujourd'hui celle de Khameney (le chef suprême - ndlr) à Massoud Radjavi. A part le nom, il n'y a aucune différence entre la RI de Khomeiny et la république « démocratique » islamique de Massoud Radjavi. Si, au moins en paroles, le régime de la RI se considère anti-impérialiste, l'organisation de Radjavi n'a pas honte de rendre public dès à présent sa dépendance envers l'impérialisme et la réaction. Pour cette organisation, les photos prises suite à mille intrigues avec n'importe quel sénateur américain, sont revendiquées comme un grand signe de gloire !

Concernant les libertés démocratiques, la secte n'admet dès à présent aucun autre courant ni aucune autre personnalité sauf elle-même. Dans son petit monde et dans ses relations internes, tout est déjà préparé pour réprimer ses opposants. La prison, la torture, les exécutions clandestines et des dizaines d'autres exactions ce sont affaires courantes et pratiquées régulièrement contre leurs opposants idéologiques, qui en cette fin de vingtième siècle, est une honte pour l'humanité. Ceux qui ne connaissent pas encore bien ce courant, considéreront peut-être que ces écrits résultent de notre opposition à son encontre. Nous avons commis cette erreur une fois et nous n'avons pas l'intention de la commettre à nouveau.

Le souvenir amer des promesses de Khomeiny est encore dans la mémoire des gens et personne ne peut les ignorer. Nous déclarons que notre organisation se devait de dénoncer la nature du régime de la RI et la personne de Khomeiny, avant l'insurrection comme elle l'a fait après. Malheureusement, l'infiltration d'opportunistes au sein de la direction de notre organisation après l'insurrection, nous a empêchés d'accomplir ce rôle comme nous le devions et nous le voulions. Comment pouvons-nous garder le silence et fermer les yeux sur ces vérités ?

Réfléchissons un peu. Si dès le lendemain de l'insurrection, notre organisation et toutes les forces révolutionnaires et progressistes avaient dénoncé la pensée anti-démocratique de Khomeiny, la population aurait-elle encore cherché à l'époque Khomeiny dans la lune ? (Au cours du mouvement anti-impérialiste - anti-impérial de la population en 1978-79, les partisans de Khomeiny avaient propagé la rumeur qu'on pouvait voir la photo de Khomeiny sur la lune, si l'on regardait bien - ndlr). Khomeiny pouvait-il encore quotidiennement se présenter depuis Kerbala (la ville sainte des chiites, située en Irak où est enterré leur troisième imam - ndlr) comme le symbole de la liberté et du bonheur pour la population ? Pouvait-il prendre si bien le pouvoir qu'aujourd'hui les ouvriers, les travailleurs et toute la population d'Iran pour renverser ce régime et se libérer du système dictatorial et religieux sont obligés de pactiser avec le diable ?

Certains nous critiqueront peut-être de considérer cette organsation comme une « secte ». Nous devons leur dire que quand une force ne respecte ni ne croit en aucun principe, et que tous ses buts et toutes ses pensées reposent sur le goût et le désir d'une seul personne, quand ses buts ne ressemblent en rien à ceux d'un courant politique, dans notre culture, comment doit-t-on les appeler ? Surtout quand ce leader est de nature religieuse. Quand cette organisation n'a aucune honte au vingtième siècle à déclarer officiellement, à plusieurs reprises dans ses publications, par sa radio et sa télévision, que « grâce au mariage de Massoud Radjavi et Mariam » ses membres qui souffraient d'épilepsie et de migraine ont tous guéri. Aussi quand elle déclare que même les médecins confirment l'exactitude de cette prétention de la direction, ces médecins sans honneur ne sont-ils pas capables un jour sur ordre de la direction, d'injecter une ampoule d'air aux opposants de Massoud et Mariam ? Dans une organisation où un seul homme peut se trouver en haut de la pyramide et pas davantage, cela ne ressemble-t-il pas à une ruche qui n'a qu'une reine ?

La conscience associée aux réalités de la société nous a transformés en une des forces opposées à tout le système de la RI et à l'instauration de tout état religieux en Iran. Toute tentative pour établir un état religieux est une action au service de l'impérialisme, de la réaction et du capitalisme. La vraie RI est le régime fondé par Khomeiny, qui est encore au pouvoir en Iran. Personne ne peut nous promettre d'instaurer une autre RI « démocratique », mieux que l'actuelle RI. S'il s'agit d'exécuter les lois islamiques et divines sur terre, personne mieux ni de façon plus populaire que Khomeiny ne peut le faire. Toute la population d'Iran s'est levée et a déclaré « notre guide est Khomeiny ». Elle a aussi payé le prix de son choix, et le paye encore. Comment la république « démocratique » islamique peut-elle changer la nature réactionnaire d'un tel système ? De quelle nature « démocratique » s'agit-il? Si la société est basée sur les lois islamiques, elle ne sera pas « démocratique », car elle sera basée sur le monothéisme. Khomeiny occupait le plus haut rang dans la hiérarchie religieuse, il était plus compétent que Massoud Radjavi qui n'a pas de jugement ni aucun rang ni aucune compétence dans le monde divin. Si la création de cette république "démocratique" islamique est fondée sur les besoins courants, les changements et les évolutions de la société, il faut souligner que par son bâton « démocratique », cette secte a déjà réprimé et réprime tous ses opposants. Que devons-nous croire ? D'après nous, la république « démocratique » islamique est sans fondement et n'est qu'une simple prétention, comme si quelqu'un prétendait pouvoir contrôler le mouvement de la terre autour du soleil.

Notre population et les organisations politiques iraniennes ont payé et payent encore le prix de leurs erreurs et de leurs déviations. L'histoire ne doit plus se répéter. Les dirigeants de la secte de Radjavi - Mariam, qui sont actuellement les marionnettes de l'impérialisme et remplissent leur devoir à son égard, sont plus sanguinaires que les dirigeants du régime de la RI. En se basant sur l'analyse des actions et des documents publiés de cette secte et d'après l'avis de tous les militants de la liberté, une république « démocratique » islamique dans la situation actuelle de l'Iran ne peut qu'aggraver la dictature et augmenter la répression et le massacre de la population et rien d'autres. Pour cette secte, la nécessité de la liberté, de la démocratie et du droit d'association n'a aucun sens. En d'autres termes ces "chevaliers" trahissant la patrie ont depuis longtemps abandonné le peuple, la lutte sérieuse et leurs buts d'origine. Ils se considèrent comme les héritiers de la RI mais avec l'assaisonnement « démocratique ». Cela fait longtemps que ces individus ont en fait choisi la réaction, la servitude et le despotisme.

C'est pourquoi depuis 1983, ils ont accueilli un certain renégat expulsé de notre organisation du nom de Mehdi Sameh. Un jour, ils le nomment membre de « conseil national de la résistance », un autre jour le présentent comme l' « OGFPI » et si un jour il leur manque un ministre pour leur «gouvernement en exil», ils le nomment ministre des mines et de l'industrie ! Nous considérons que toutes ces manoeuvres ridicules sont au service du régime de la RI, de l'impérialisme et de la réaction.

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Au lieu d'adopter une attitude illogique et irresponsable à l'égard des questions du mouvement révolutionnaire, au lieu d'ignorer la réalité, il vaut mieux consacrer notre temps et notre énergie à lutter contre le régime de la RI. Auparavant, il y avait plusieurs organisations qui avaient fondé leur activité et leur renforcement sur l'affaiblissement des autres. Ont-elles pu obtenir quelque chose, à part leur propre anéantissement, en poursuivant cette politique ? Il ne faut pas confondre analyse critique et lutte contre des pensées avec la conception d'injures.

Supposons que nous arrivions à prendre le pouvoir à court terme. Au lendemain du renversement du régime, avec quel programme et quelle ligne politique commune, devons-nous construire la nouvelle société ?

Il faut apprendre du passé. Il faut s'unir et canaliser toutes les forces et les capacités vers un but commun. Il faut abandonner les mauvaises volontés et les attitudes illogiques. L'évolution de la situation actuelle en Iran exige la collaboration et le soutien mutuel de toutes les couches sociales. Si nous nous considérons comme le représentant d'une classe ou d'une couche de la société, notre victoire est liée à notre collaboration avec les représentants des différentes couches de la société. Alors qu'attendons nous ?

 

Article paru dans KAR - L'organe de l'OGFPI - Eté 1996